Le bon… et le truand

Greg continue à vélo, moi à moto. Devinez qui est qui.

Après 6000 bornes et des brouettes, j’en ai ma claque de pédaler. Ca a commencé avec le sud de la Chine dont je parle dans cet article. La fin fut un calvaire, à pédaler dans la boue, de nuit, se laver sommairement avec un fond de bouteille d’eau pour paraître plus présentables aux hôtels qui nous refuseront tous. Bonheur. Je commence sérieusement à songer à écourter ce voyage, le pédalage ne me convenant plus du tout. Peut être aller jusqu’en Thaïlande et prendre un vol pour l’Australie.

Puis ce fut 2-3 semaines de glandouille à Kunming, et des bus, et enfin le Laos. À Luang Prabang nous commençons à sortir avec un groupe de 5 autres personnes. Lars, un hollandais achète une moto à un mec venu du Vietnam qui cherchait un acquéreur au Laos. 350$… seulement 350$ pour ce machin à 2 roues et à moteur tellement cool. L’idée commence à me traverser l’esprit et je repense au jour où j’avais emprunté la brèle de Greg pour aller à un cours de musique. C’était chouette et ma seule expérience jusqu’à présent d’une 50CC.

On prend un bus tous ensemble jusqu’à Vang Vieng. Sur place nous louons des scooters pour une journée pour aller jusqu’au Blue Lagoon, un genre de petit paradis d’eau turquoise, de papillons et de poissons. Le chemin de terre est défoncé ce qui ne fait qu’ajouter du fun au parcours. On s’arrête en pleine cambrousse boire une bière puis on reprend la piste. Je m’essaye aux dérapages, un scooter n’est pas spécialement idéal pour ça mais ça marche plutôt bien. La journée se fini de nuit sous une pluie battante à cause d’un pneu crevé, à boire d’autres Beerlao avec le loueur de scooters. La journée n’a fait qu’attiser mon envie de continuer à moto.

Retour au vélo pour se traîner jusqu’à Vientiane. Le trajet est court et se boucle en 2 jours, mais la fin de la route est dégueulasse avec des tronçons entiers de bitume arrachés. Mon postérieur couine de douleur et la poussière est partout, dans les yeux, la bouche, sans parler des vêtements maintenant marrons. C’est officiel, c’est la fin du vélo.

Il me reste maintenant à trouver un moto vietnamienne d’occasion à Vientiane, Laos (la seule solution si je veux pouvoir entrer au Vietnam). J’écume internet sans résultat, les annonces locales, nada. Une annonce à Vang Vieng (merde ! j’en viens) attire mon attention, mais le vendeur est un peu trop mystérieux quant à l’engin. J’envisage alors sérieusement de prendre un avion pour Ho Chi Minh et acheter directement là bas juste avant qu’un irlandais se pointe en moto à mon auberge et placarde une feuille « FOR SALE » sur la bécane. Un tour d’essai plus tard et 400$ en moins, me voila équipé d’une chouette Honda Win 110CC.

La suite ? Le vélo va être envoyé en poste restante à Bangkok. Je le récupère sur place dans 3 semaines et lui trouverai un foyer d’accueil pour quelques mois le temps de visiter Thaïlande, Cambodge et Vietnam. Je déciderai de son sort à mon retour.

J’espère avoir un peu bluffé ceux qui me connaissent un minimum pour être arrivé jusque là, mais on ne peut pas faire illusion éternellement ;)
Le vélo, la tente, le réchaud… HA-HA




Snake Lao Lao time

Il y a différents évènements qui nous ont conduit à ne pas vous donner de nouvelles pendant un moment. Nous n’entrerons pas dans les détails, mais vous comprendrez aisément les grandes lignes de nos dernières semaines.
La premières raison à ne pas écrire en fin de séjour chinois étant qu’une certaine monotonie voire lassitude s’était emparée de nous. Comme écrit dans l’article précédent, trois mois de Chine c’est usant psychologiquement et on aspire à autre chose, à s’évader de cette d’ambiance particulière. Mais on est clairement pas à plaindre (je sais que certains sont en pleine dépression en France et d’autres n’osent même pas lire notre site pour ne pas y tomber à leur tour… suivez mon regard.) et cela n’excuse qu’une ou deux semaines de silence.

La suite est tout autre. Entrés au Laos le 12 novembre par Boten, notre premier soir annonçait la couleur : nous arrivons au Spicy Lao Hostel de Luang Prabang accompagné de Lars (Hollandais rencontré dans le bus) et l’accueil laotien du proprio ne manque pas de sel. « Sabaidee, you have to drink Snake Lao Lao ». En gros, « Bonjour, vous devez boire notre alcool/whisky local dans le bocal plein de serpents flottants là ». Ouch, couillu le marc! La suite de la soirée se passe à l’Utopia, bar de la ville au bord du Mékong où on joue au beach-volley, puis au « bowling » du bled. À partir de là, nous parlerons d’un trou de mémoire entre deux paillardes et je me réveille le lendemain sans mon passeport et la tête pleine de cheveux à l’intérieur. Les journées soirées se suivent et se ressemblent avec une étape au disco et toujours plus de cheveux qui poussent à l’intérieur. Pendant ce temps nous nous sommes entourés d’une bande de joyeux phénomènes (un Danois, le Hollandais, une Lituanienne, un couple d’allemands, une suisse et parfois d’autres) et ne nous quittons plus.
Kayak, baignade en eaux turquoises sous les chutes d’eau, beer Lao, surf sur le toit des tuk-tuk on ne s’ennuie pas et… on n’écrit pas.
La police appelle trois jours plus tard pour indiquer que quelqu’un a fini par retrouver mon passeport dans la rue, au pussy market. « Euh… mais c’est quoi ça le pussy market? » La seule explication que j’en aurais sera « pussy market » et personne n’a rien vu qui pourrait y ressembler mais soit, l’essentiel étant d’avoir retrouvé mon passeport contre 10€ et 5 bières.

Sans transition, nous passons de Luang Prabang à Vang Vieng, lieu de recueillement pour fêtards où l’activité principale consiste à monter sur une chambre à air de camion dans la rivière et à s’arrêter dans chaque bar des 3km du parcours en attrapant la corde qu’on vous jette en vous proposant des produits amusants : c’est le tubing. Les boissons se commande par « bucket » (un seau…) et sont parfois servis par des mamies de quarante-cinq soixante ans. On en dit pas plus, les images google vous donneront un meilleur aperçu de la retenue qui peut habiter cet endroit du petit dej’ jusque tard dans la nuit.
Certains occidentaux sur place depuis des mois semblent quand même un peu perdus à trainer là tous les jours sans aucune autre vue à long terme. Une semaine suffira pour nous tous, que nous entrecouperons par une journée de location de petrolettes et des baignades au blue lagoon, le nom parle de lui même.

Il était alors temps de partir en direction de la capitale Vientiane, en vélo cette fois. Les autres passeront une nuit dans un petit village laotien, invité par un local que nous n’avons pas pu rejoindre à temps. Prochaine fois. Les gens sur la route sont adorables, les enfants disent tous bonjour ou plutôt « Sabaidee » et beaucoup veulent nous taper dans la main à notre passage. Un ressenti complètement différent de la Chine où nous étions pris pour des jukebox. Vientiane semble à première vue beaucoup moins vivante que les villes précédentes, c’était sans compter sur les fouilles de la police sur la plage Kalashnikov en mains, le foot de rue avec les gosses, les après-midis ensoleillées pétanque-pastis (les Français ont laissé beaucoup de traces de leur passages ici), les bus thai VIP night club stationnés dans la rue, nos encouragements sans faille lors des matchs de foot au stade, au bord du terrain, partageant ensuite la troisième mi-temps avec les joueurs.

Nous en sommes grosso-modo à ce point. Notre groupe s’est séparé aujourd’hui, chacun ayant des destinations différentes à partir de là (avant de se retrouver plus tard toujours dans la région?) et nous devons attendre deux jours de plus avec Alex que l’embassade thaï veuille bien nous donner notre visa d’un mois. Demain c’est plage au bord du Mékong avec la Thaïlande 50 mètres en face et une furieuse envie de traverser à la nage. Pauvres de nous…

Aujourd’hui un grand changement est intervenu pour la suite du parcours, Alex ayant fait l’acquisition d’un bel engin motorisé nous contraignant de poursuivre chacun de notre côté temporairement bien que suivant toujours le même chemin avec Bangkok pour objectif dans moins d’un mois.




Aux portes du Tibet

À Shangri La, il neige. Merde, on avait rien prévu de ce côté là, nous qui devions suivre la chaleur de l’été. On aurait cependant pu s’y attendre en montant début novembre aux portes du Tibet à 3200m d’altitude mais toujours étant que le froid nous a surpris les bourses assez soudainement à la sortie du bus nocturne. Sûrs de pouvoir trouver une auberge rapidement nous refusons les taxis et partons tourner 2-3 bonnes heures dans les rues gelées de la ville ayant emprunté son nom à un roman de science fiction. Les locaux n’ont pas le regard bien amical dans leurs vêtements funky-colored-style et nous nous tournons vers la police pour retrouver les chemins d’un foyer. Nous arrivons finalement dans un hostel au bilan énergétique proche d’un igloo grâce à ses immenses baies vitrées et ses portes déglinguées. De toutes façons, on ne chauffe pas 21h/24 et chaque lit à sa couverture chauffante.
Les petites ruelles de la vieille ville restent assez authentiques malgré la permanente pêche au touriste des nombreuses échoppes et tous les soirs ce beau monde se réunit sur la grande place pour une farandole géante. Aussi bien sur Shakira que sur une musique locale d’ailleurs, l’essentiel étant de bouger pour réchauffer ses petits orteils tout bleu avant d’aller se payer une bonne tranche de yak dans un resto. On pense quand même que les bêtes doivent crier famine dans cette région pour avoir à chercher les morceaux de bidoches à ce point. Mieux vaut presque goûter au thé au beurre de yak pour en découvrir la saveur corsée.
Ce matin, il reneige, à gros flocons en plus. Faut pas pousser mémé dans les orties quand même, on se tire avant d’avoir à chausser les raquettes direction… le Yang-tsé-kiang ! Eh oui, c’est une grande histoire d’amour que voulez-vous. Mais cette fois pas de bateau, c’est randonnée au-dessus des gorges du saut du tigre.
Sur place nous suivons un Chinois rencontré dans le bus (ne jamais suivre un Chinois depuis un bus, ça pue la déroute) qui nous plante devant une espèce de guichet l’où nous réclame 50¥ alors qu’il ne s’acquitte que de 10… Nous refusons, insistons pour passer mais 15 guignols nous barrent désormais la route. Hors de question de payer pour un bidule qu’ils n’ont jamais entretenu, nous empruntons alors un chemin de terre 200m plus loin qui nous fera éviter les guichets après 2-3h de détour. La route que nous arpentons est splendide mais crevante, les dénivelés se succèdent en serpentant au-dessus du précipice qu’a créé le fleuve et nous bouclons notre tour en deux jours après une étape nocturne dans une auberge isolée de la montagne.

Nous rentrons à Kunming, contents de cette dernière boucle pleine de surprises et soulagés se savoir la fin de notre séjour en Chine se rapprocher. De l’avis de tous les voyageurs que nous avons croisé nous pouvons sans trop de risques affirmer que le pays regorge de chefs d’oeuvre et de gens adorables mais 3 mois à communiquer par l’absurde avec la population et à tenter de ne pas se faire pigeonner en payant des activités touristiques hors de prix, c’est un poil trop long pour y revenir avant une bonne paire d’années.

Au rayon des lieux à voir en Chine nous citerons :
-La Muraille, incontournable. Essayez de trouver une portion pas trop bondée. Dormir dessus a été une expérience très sympa aussi.
-Beijing, parce que quand même.
-L’armée en terre cuite de Xian même si Alex n’est pas d’accord.
-Chongqing. Ville hors du temps. Gotham City en Chine.
-La petite croisière sur le Yang-tsé de Chongqing à Lijiang.
-Shanghai, parce que quand même.
-Guilin-Yangshuo et les paysages karstiques.
-La région des rizières en terrasse entre Guilin et Guiyang. On peut payer pour se rendre à Ping’an, Alex estime que ça vaut le coup, je pense que la route après Ping’an longeant le fleuve est tout aussi jolie avec les séries de villages réellement traditionnels, perdus et accessibles par barque. Par contre la route est parfois impraticable et les hôtels de certaines villes ne veulent pas recevoir d’étrangers. Après 100km dans la boue et une arrivée de nuit c’est assez rageant.

Ça, c’est ce que nous avons vu, il est certain que bien d’autres coins méritent le déplacement. Juré, craché (forcément, nous sommes en Chine…).

Ps : les 6000 sont atteints!




Xiang land

Wantianyaozuxiang, Hepingxiang, Pingyangxiang, Doulixiang, Yonglixiang… et quand ce n’est pas xiang, c’est jiang. Sanjiang, Congjiang, Rongjiang…

A défaut d’être un coin plein de xiang et de jiang, c’est aussi une belle région connue pour ses rizières en terrasse et l’éthnie Yao, dont les femmes ne se coupent jamais les cheveux. Ces dernières s’enroulent leur immense chevelure au dessus de la tête dans un bout de tissu et sont très promptes à défaire l’ensemble contre quelques piécettes. « Photo photo » scandent-elles à la vue du touriste. Le cheveux est un business qui leur rapporte sans doute plus que la culture du riz. Je me demande d’ailleurs si certaines ne porteraient pas de perruque, l’achat serait surement vite amorti. Je ne suis pas fan de ce rapport biaisé locaux – touristes et ne sortirait donc pas le sous, tant pis pour la photo. D’un autre côté lorsqu’on fait du tourisme en Chine il faut vite se rendre à l’évidence qu’il ne reste pas grand chose d’authentique. Le Palais d’Été a été reconstruit deux fois ainsi que la plupart des temples avec d’authentiques poutres en béton du siècle dernier. Les restaurateurs d’oeuvre d’art s’arracheraient les cheveux ici, la politique étant « on rase tout et on reconstruit à l’identique ».

 

Si la route que nous avons emprunté serpente au milieu de rizières, il y a toutefois un endroit plus spectaculaire (et onéreux) à noter : Ping’an. Il s’agit d’un village perché en haut d’une montagne, accessible après 6km de douloureuse montée, et se termine par des escaliers escarpés, le paradis du vélo. Les habitants dorment sans doute dans les cultures étant donné que les bâtiments ne sont que hôtels, auberges et restaurants. D’en haut, on surplombe les rizières en terrasse, ces dernières portant tous un nom idyllique (« 9 dragons », etc etc), et des chemins de randonnée permettent de s’y balader ainsi que de rallier les villages voisins. Nous n’avons pas eu de chance, le ciel était gris, le riz coupé et les plateaux n’étaient pas gorgés d’eau. Surement les pires conditions pour apprécier le site, malgré quoi le paysage reste d’une incroyable beauté.

Nous passons la nuit dans une auberge pour redescendre le lendemain. 6 km de descente gravis la veille dans la douleur, redescendus les deux mains crispés sur les freins en quelques minutes !

Aucun risque de se perdre pour les jours suivants, la route suit tout simplement une grosse rivière. On traverse beaucoup de petits villages où parfois un magasin high-tech côtoie des joueurs de mah-jong et une vieille femme en train de promener des chèvres. Les habitants utilisent de longues barques effilées très rudimentaires pour traverser la rivière et commercer avec le village d’en face. Le moteur parait si faible que la barque semble ne pas pouvoir résister au courant. Ce n’est qu’après un long virage et quelques dizaines de mètres de perdus que l’embarcation atteint finalement sa destination.

La météo se dégrade en même temps que l’état des routes. Nous nous retrouvons au bout de quelques jours sur des sections boueuses et caillouteuses. La dernière journée en direction de Rongjiang est un cauchemar. La carte routière est encore fausse (découvrir qu’il va falloir faire 20km de plus sur ce qui était prévu et finir de nuit est toujours un grand moment de bonheur) et la route est plus défoncée que jamais, pleine de flaques boueuses. Nous arrivons finalement à Rongjiang de nuit, nous nous lavons sommairement avec le reste de notre eau afin de ne pas effrayer les hôtels et partons à la recherche de deux bons lits. Le premier hôtel « meyo » (non). Second idem, troisième pareil… dixième, la même ! On enchaîne tous les hôtels d’une rue pour entendre invariablement la même réponse. Greg explique la situation à un flic. Ce dernier monte dans une camionette avec deux filles (civiles, on a pas compris) et nous demande de le suivre. Il nous fait pédaler jusqu’à des hôtels que nous avons déjà testé et négocie à son tour sans plus de succès. En effet en Chine une loi remarquable précise qu’un hôtel a besoin d’une autorisation pour héberger des étrangers.

Enfin bref, on aura quand même dormi dans une piaule ce soir là et nous nous sommes vite barrés en bus le lendemain matin !