Petite boucle en altitude

Arrivé à Chiang Mai (en thai, la rose du Nord, 250 000 habitants) en train après avoir attendu en vain des nouvelles du sac d’Alex à Bangkok, nous passons quelques jours dans cette ville assez sympa du nord de la Thaïlande. Pas grand chose au programme mais le cadre est relaxant, à l’instar des prix. Tiens, la nourriture birmane est moins chère ici qu’en Birmanie.

Je profite de ces quelques jours loin des chambres confinées de Bangkok pour changer mes pédales gracieusement envoyées pour Noël par notre sponsor, Vélo Papillon qui place désormais notre site en première page du sien. C’est pas la classe ça?

Bon c’est vrai qu’il peut s’en vanter. Il a préparé les vélos des deux plus gros tocards du monde cycliste, et ils tiennent le coup (les vélos hein, parce que sinon y en a déjà un sur une moto et l’autre qui ne fait le barbot que dans les descentes) malgré l’entretien a minima avec 3 gouttes d’huile quand ca commence à couiner dans tous les sens, et des chocs répétés dans les différents transports (entre deux wagons de train, sur une soute de bus pleine à craquer, sur le toit des bus, à l’arrière d’un pick-up dans le gravier, dans les coffres, etc.). Hier, je me suis penché sur le réglage des vitesses – à la pince à ongles – pour la première fois depuis l’Ukraine si mes souvenirs sont bons, ça commençait à être un joyeux bordel. Toujours aucune pièce changée, 5-6 rustines en 8000 kms, un coup de pompe, trop facile. Bref, heureusement que les vélos sont plus costauds que les jambes.

velo

Surtout que les jambes, depuis mon faux départ (150kms aller-retour) pour le Cambodge début janvier n’avaient jamais revu le Montague hors de sa housse. Autant dire que c’était le désert sportif depuis près de deux mois et mon improbable record. Le problème dans ces cas là c’est que les ambitions ne suivent pas la même courbe décroissante et qu’une étape de 110kms nous fait doucement rire autour d’une bière. Sur la ligne de départ, on se gratifie vaillamment d’un « à ce soir » à ceux qui partent en bus et on y croit bien fort en serrant les poings pendant les 35 premiers kilomètres… sur route plate. C’est à partir des pentes à 15-20% et des premières crampes à 5km/h qu’on commence à comprendre que ce sera dur. Un peu d’étirements, de l’eau on repart pour 500m, belote et re-belote sur 5km. Il faut bien se rendre à l’évidence : on était parti avec du coeur, on a été laissé sur le carreau, capot après 64kms. Bon cette fois, c’est décidé je coinche (et j’arrête les références à ce jeu, promis) : je fais du stop. Je prends même pas soin de plier le vélo, y a que des pick-ups sur cette route. Comme d’habitude avec les Thais, c’est facile über alles : première voiture, j’embarque tout le barda à l’arrière. Le conducteur ne peut m’avancer que de 30kms (quand je vois les montées suivantes je ne regrette pas une seconde l’abandon) et finit par m’inviter chez lui, à Mae Sae, petit bled perdu dans les montagnes que je n’arrive même pas à trouver sur google maps. Pran a construit plein de petit bungalows en bois, bamboos, feuilles pour le toit, sur un terrain immense. On se croirait perdu au milieu d’une forêt de palmiers, de bamboos, n’entendant que l’eau de la rivière. C’était superbe. Sauf qu’il y a l’eau chaude, des lits, du réseau pour le téléphone et… internet. C’est dingue.

pran

J’hériterai donc de mon bungalow pour la nuit après avoir mangé avec mon hôte et contacté Alex pour annuler la réservation à Pai, ce qu’il avait anticipé en voyant la route. Je refuse draps et couverture en arguant que mon sac de couchage suffira mais ici la nuit est fraîche malgré la chaleur en journée et je me gèle les meules bien sévère. Depuis, je me suis résigné à ne pas sortir la tente dans la région.

bungalowpran

Le lendemain, on m’offre encore le petit déj’ (soupe de courge aux croutons + cacao au lait de coco et cannelle) et je reprends la route pour Pai. Quinze kms de montée m’attendent encore du départ et quand je croise un cycliste Québecois complètement en nage, je comprends que la suite sera plus aisée. L’occasion de s’arrêter dans des sources chaudes pour 100 baths après quelques rencontres inattendues et de prendre un bon bain pendant quelques heures. Par contre on ne me laissera pas avancer avec mon vélo jusqu’au bout, je ne rentrais pas dans les standards de l’établissement…

elephant

sources

Quelques jours passés à Pai (3000 habitants et pas mal de touristes) dans un auberge au milieu des champs de riz, l’occasion de fêter dignement la n-ième séparation avec notre ami Danois et une nouvelle avec Alex qui s’en va poursuivre sa loose (je persiste avec la théorie de la punition de Dieu) au Cambodge pendant que je pars me promener un peu dans les montagnes. Cette fois j’ai zyeuté le profil altimétrique de la boucle et je prends soin de ne pas me fixer d’objectifs. Premier jour : 44km, arrêt à Pang Mapha, je ne trouve qu’un bungalow à 350 baths. C’est classe, avec piscine, mais je m’en cogne, je veux juste un matelas par terre, au chaud. J’avais bien en tête la ville de Mae Hong Song (la ville des trois brumes, je sais pas pourquoi…) à 110 bornes mais bon… ne déconnons pas.

road

Deuxième jour : Mae Hong Song donc, 73kms, 6000 habitants, c’est LA grosse ville de mon parcours. Eh ouais. La route est vraiment superbe et l’arrivée en haut des cols (et c’est toujours plus beau lorsqu’on arrive en vélo, une question de mérite sans doute) offre toujours de magnifiques points de vue sur la région et les petits villages perdus dont on peine à apercevoir la piste d’accès. Je prends mon temps, visite une sorte de monastère de méditation où il est a priori possible de passer la nuit pour rien, où les résidents de passage principalement occidentaux, sont tout de blanc vêtus. Ambiance secte très zen mais le moine que je rencontre n’avait pas l’air très enclin à m’offrir plus qu’un café et comme je ne voulais pas lui demander directement de profiter de leur hospitalité, je poursuivais ma route.

secte

vue

En chemin, j’aperçois un combat de coqs. Là aussi je stoppe pour venir former moi aussi le petit cercle de spectateurs autour de cette étrange bataille. Je deviens pendant quelques minutes une plus grosse attraction que les plumes qui volent au son des « farang, farang » (étranger, en thai) et le combat s’arrête quand les prorpios le décident et finissent par bichonner leur poulain chacun de leur côté. Match nul?

Round d’observation…
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FIGHT!
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J’arrive de nuit à Mae Hong Song et cherche pendant près d’une heure une piaule miteuse pour 200 baths, c’est désormais ma limite.
Troisième jour, c’est la saint Valentin, encore une grande journée d’amour sur les très belles routes montagneuses avec mon vélo. Je retrouve à cette occasion un peu de niak dans le pédalage, celle qu’on met quelques semaines à acquérir et qu’on perd trop vite. Je croise un collègue Allemand bedonnant sur la route et je stoppe à Khun Yuam après 70kms, immense chambre rudimentaire, 200 baths une fois encore.

deutsch

riz

Quatrième jour, 70km là aussi, la route est toujours vallonnée mais plus douce. J’atteins les 20km/h de moyenne, ça me change des 15-16 habituels et j’arrive à Mae La Noi, d’où j’écris cet article. Sur place, les premiers prix sont carrément fous : 1500 baths! Euh… je suis bien à Mae La Noi là non? Il faudra qu’un local m’emmène un peu en dehors de la ville pour atteindre une chouette place à 300 baths la chambre. J’explique alors que je veux 200 maxi, que je me fiche pas mal des arguments sur la vue (du paysage j’en vois assez toute la journée pour ne pas encore me lever la nuit pour l’admirer) ou le confort, je souhaite juste un lit. Après quelques hésitations, on finit par me loger dans la salle de massage pour 200 baths. Y a un matelas par terre, un oreiller, on m’amène des couvertures. Il me faut pas plus.
Il se trouve qu’en plus il y a de l’ADSL (ça m’épate toujours autant dans ces coins…), ce qui fait qu’aujourd’hui au moment de partir, je décide de rester une journée de plus pour mettre un peu tout à jour.
Et une journée de repos pourrait peut être me redonner un peu de courage pour la suite où je comptais clairement faire du stop.
Prochaines destinations : retour à Chiang Mai et poursuite de la découverte plus au nord-est de la Thaïlande ce qui fera sûrement l’objet d’un autre article.

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Ensuite, c’est une surprise, il faut d’abord que j’arrive à organiser tout ça. Personne ne l’a peut être jamais fait là-bas. Réponse d’ici deux-trois semaines!

ps : alors que je finis d’écrire je viens d’entendre que la chambre pour le gars qui vient d’arriver en moto est à 400 baths.
Qui a dit « à la tête du client« ?

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