Plateau des Bolovens

Malgré l’échec désormais digéré du tuk-tuk, nous décidons de ne pas changer nos plans et nous nous rejoignons donc à Savannakhet pour une petite virée à deux dans la région des Bolovens. Notre affolante énergie du dernier passage au Laos ne nous avait pas permis de visiter ce coin, il fallait réparer la chose.
Nous disposons alors de deux options : louer une moto pour Greg ou trouver un moyen de faire avancer le vélo à une vitesse proche de la moto. L’option location s’effrite rapidement : 70 000Kips la journée pour un scooter et pas d’assurance. Nous ne parlons pas d’assurance perso mais de garantie en cas de casse matériel car ici c’est le locataire qui paie le nouveau moteur s’il tombe en rade au bout de deux kilomètres.
Bref, nous tentons autre chose. Tenir la moto à bout de bras, c’est carrément casse gueule, une corde serait trop brusque dans les accélérations (et vlà le bordel si on s’écarte!), le tendeur sera donc la solution. Un essai concluant, un achat de tendeur assez long et nous partons de Savannakhet sur les routes à 50-60km/h provoquant généralement l’hilarité de ceux que nous croisons. Le plus marrant restant la tête des camionneurs qui, doublés par une moto, suivent le câble des yeux jusqu’à apercevoir le vélo qui les dépasse.

Nous ne tardons pas à nous engager sur des pistes parsemées de villages perdus, gamins pieds nus à défaut d’être carrément culs nus. Notre premier soir sera l’occasion de renouer avec un mode de vie que nous avions plus ou moins laissé de côté depuis fort longtemps : le camping. Il suffisait de tomber dans un bled paumé sans un resto ouvert après 17h, un temple abandonné et une ribambelle de gosses pour nous accompagner.

La pluie s’invite au rendez-vous le lendemain avec des résultats tout à fait conformes à ce genre de situations : de la boue plein la mouille. L’avantage, c’est que les pistes sont assez bonnes pour le moment, mis à part quelques passages délicats, mais rien d’insurmontables : il suffit qu’Alex ralentisse un poil pour que j’arrive à maintenir le vélo sur les rails.

Après un bref retour forcé sur la route principal, nous repiquons au sud en direction de Saravan depuis Muang Phin. Des pistes impeccables sur lesquelles on s’éclate vraiment de notre nouveau mode de transport. Arrivés au village de Tat Hai, l’agitation autour de deux farangs perdus retombée, on nous indique une petite terrasse couverte pour y passer la nuit avant de nous amener deux paillasses et deux oreillers. Nous passons le reste de la soirée en compagnie d’expatriés Viet-Namiens qui nous offrent un très bon repas (riz, soupe au poisson, viande braisée et bières évidemment) malgré une communication des plus délicates. Nous sommes réveillés le lendemain matin à 6h30 par ces mêmes Viets qui nous offrent cette fois le petit déjeuner (tripes, restes de poisson, riz). Ça réveille!

8h30, nous dédommageons nos hôtes et embarquons pour 30 000Kips pour traverser la rivière. La suite du parcours devient plus compliquée. La piste unique et praticable se transforme en une multitudes de chemins sablonneux casse-gueule comme pas deux. Et bien entendu, pas un local à l’horizon dans les rares maisons. Laissons-nous guider par le soleil, nous finirons bien par trouver un humain.

Les quelques laotiens en train de glander sur les routes nous indiquent alors tous que nous sommes sur la bonne piste, c’est déjà ça. Il semble que nous ayons quand même eu un peu de chance à certains moments. Lorsque nous demandons notre route à un groupe de procrastineurs professionnels, ceux-ci nous l’indiquent du bras puis finissent par enfourcher leur scooter, nous doubler et nous montrer la suite du parcours sur la droite, à moitié cachée dans un buisson. Eh ben, heureusement qu’ils étaient là.

Le sable ne disparait pas, nous ralentissant considérablement et la piste est de plus en plus accidentée. Je dois constamment descendre de vélo dans les pentes boueuses lors des passages de rivières et nos deux véhicules ramassent beaucoup de chocs assez durs. Le tendeur lâchera par 3 ou 4 fois dans la journée, mon câble de compteur de vélo se sectionne par magie et on finit par se taper des pistes caillouteuses insupportables. Bref, quand y a pas de trait sur la carte, il y a une raison! Enfin, on aura vu des petits coins du Laos que peu ont goûté avant nous, provoquant toujours les rires et les nombreux Sabaidee! sur notre passage.

Nous arrivons à Saravan (ville sans intérêt) après une journée de près de 10h sur nos engins. une chose est sure : le tuk-tuk ne serait jamais passé par là et le scooter aurait ramassé.
Depuis Saravan, nous nous rendons à Tat Lo, chutes d’eau très sympa, pas trop touristiques, gratuites (c’est à souligner) où nous passons quelques jours.

Départ ensuite pour Attapeu, ville recommandée par un franco-laotien dans un bus et que nous ne recommanderons pas à notre tour. Eh oui, les villes de cette région n’ont strictement aucun intérêt. Nous quittons donc pour nous rendre aux prochaines chutes d’eau sur la route de Paksong/Paksé. nous nous retrouvons rapidement sur une piste/route en construction avec 10cm de poussière, du sable plein les yeux à chaque passage de camion et une chaîne de moto détendue qui saute tous les cent mètres sans rien pour réparer.

Les camions refusant de nous remorquer jusqu’au prochain garage, nous devons improviser avec les moyens du bord : du fil de fer, une clef, c’est reparti.

Nous comprenons que nous sommes vraiment dans les profondeurs du Laos quand nous croisons une femme, seins nus, portant son enfant sur le dos. Nous dormons le soir dans une guest house perdue dans les montagnes où nous comptions passer plusieurs jours à visiter les alentours. Malheureusement le propriétaire, trop Laotien pour aller faire les courses depuis 4 jours (c’est lui qui le dit) ne décide de nous servir que des nouilles instantanées et du riz blanc, et le farceur y met le prix en plus. Bref, nous brisons là dès le lendemain matin et atterrissons finalement aux chutes de Tat Gneuang où les photos vaudront mieux qu’une explication (en surtout il est tard et c’est bourré de moustiques autour de moi, ce qui explique le style robotique de l’article tapé à la va-vite).